Mort de Brigitte Bardot : de Marianne à Marine, des prises de position politiques controversées

Gaulliste. Et gauloise. Sans filtre. Brigitte Bardot ne manie pas la langue de bois. Tant d’outrances, d’humeurs, de haine parfois. Entre la politique et l’actrice, tout avait bien commencé. B.B., fan du Général. Elle confie dans ses Mémoires avoir voté pour la première fois le 28 septembre 1958, le jour de ses 24 ans : « Je donnai ma voix, ma confiance et mon respect à de Gaulle. J’ai toujours eu un faible pour ce grand homme intègre, courageux, solide et rassurant. C’est lui que je suivis pendant des années. C’est lui que je regrette depuis des années. » À la lecture, on pourrait penser qu’il s’agit de la présidentielle de 1958. En réalité, du référendum pour une nouvelle Constitution entraînant la naissance de la Ve République. Comme 82 % de Français, la jeune actrice a dit oui à cette évolution. Pendant la guerre d’Algérie, Bardot montre beaucoup de courage lors d’une tentative de racket de la part de l’OAS du général Salan, en lutte contre de Gaulle pour garder l’Algérie française. L’Organisation Armée secrète veut « l’imposer » pour la somme de 50 000 francs. Elle rend publique cette lettre de chantage, avec une réponse à la Bardot : « En tout cas, moi, je ne marche pas, parce que je n’ai pas envie de vivre dans un pays nazi. » Ses avocats, Jean-Pierre Le Mée et le jeune Robert Badinter , portent plainte. La « petite biche » et le « roi des menteurs » Elle devient, en 1971, la première personnalité à incarner la Marianne des mairies de France, avant Michèle Morgan, Mireille Mathieu, Catherine Deneuve ou Laetitia Casta. De Gaulle, qui rendait à Bardot l’estime qu’elle lui portait, a encouragé ce projet avant la fin de son mandat, en 1969. L’actrice est également appréciée par son successeur, Georges Pompidou, mais après la mort de ce dernier, c’est pour Valéry Giscard d’Estaing qu’elle s’engage vraiment, en 1974. Un coup de foudre amical pour elle, une tentative de séduction pour lui. Celle qui vient alors de mettre fin à sa carrière se balade pendant sa campagne avec le tee-shirt « Giscard à la barre ». Il l’aidera à son tour, trois ans plus tard, dans son combat pour les bébés phoques. Fin 2020, quand VGE succombe à 94 ans des suites du Covid, la star rend hommage dans une lettre ouverte au « seul Président qui m’ait apporté une aide précieuse pour les animaux ». Le dernier, écrit-elle, « à faire rimer Présidence et Élégance ». Monsieur le Président, Cher Valery, J’ai pour vous une infinie reconnaissance car vous êtes le seul Président qui m’ait apporté une aide précieuse pour les animaux. pic.twitter.com/QS2AfeezUJ — Brigitte Bardot (@brigitte_bardot) December 3, 2020 Elle soutient Chirac, qui l’appelait « Ma petite biche » mais devient « le roi des menteurs ». Celle qui ne pardonne pas les promesses n’engageant que ceux qui les reçoivent lui préfère ensuite Jospin. En 2007, elle vote Sarkozy, qui la décevra aussi pour n’avoir pas tenu ses engagements envers la cause animale. En 2012, elle le qualifie, tout comme François Hollande, de « guignolos », mais elle saluera l’écoute du président socialiste. De Macron, elle confiera avec ironie « qu’il devrait être acteur, tellement il est beau », mais n’a pas goûté d’être reçue à l’Élysée avant de découvrir que le chef de l’État soutenait les chasseurs. Feu sur Macron. Son parti de cœur ? Le Front national. Elle épouse en 1992 Bernard d’Ormale, conseiller de Jean-Marie Le Pen . Marine ne lui déplaît pas non plus : « Je souhaite qu’elle sauve la France, elle est la Jeanne d’Arc du XXIe siècle ! » clame-t-elle en 2014 dans Match. « J’aime beaucoup Marine, je l’affirme et je n’ai pas à m’en cacher », ajoute-t-elle dans l’émission « Un jour, une histoire ». Une honnêteté parfois gênante Ces dernières années, Brigitte Bardot, amère, s’était beaucoup moins engagée. Au début du mouvement des Gilets jaunes, elle a immédiatement enfilé celui qui traînait dans sa vieille voiture et a posé sur les réseaux sociaux . Un clin d’œil à un milieu populaire et parfois populiste avec lequel elle se sent profondément en phase, bien plus qu’à la grande bourgeoisie de son enfance. Ceux qui n’ont plus d’argent pour faire un plein d’essence, acheter à manger à leur animal de compagnie ou boucler les fins de mois mettent en branle sa compassion. Surtout s’ils ont leurs papiers en règle. Car, s’il existe une constante de la Bardot du XXIe siècle, c’est son aversion pour les immigrés et migrants. « Donnons déjà à manger à nos petits vieux qui n’ont rien », nous lançait-elle en 2018. Son statut d’icône, même abîmé par ses déclarations fracassantes, fait qu’on a accordé beaucoup d’attention à des opinions politiques qui tiennent souvent du propos de table. Bardot s’est prononcée pour Giscard parce qu’ ils étaient amis de vacances, de soirées, de jeux dans des stations de ski huppées. Sa manière de parler cash lui a valu procès et inimitiés, voire une franche détestation. Oui, B.B. est extrême. D’extrême droite, pas forcément. À la fin de sa vie, elle n’accordait plus son soutien à personne. Plus résolument misanthrope que prudente, car son image a toujours constitué le cadet de ses soucis. Sûrement a-t-elle gardé un minimum de réserve pour protéger sa Fondation, devenue une très grande entreprise. C’est pour cette dernière, seulement, que Brigitte Bardot s’est parfois excusée de ses outrances. Les animaux, les seuls pour qui elle a pris parti passionnément.