Tous les journalistes et critiques de cinéma au monde le savent : lorsqu’un studio ou un distributeur ne leur montre pas un film en projection de presse, cela n’augure rien de bon pour la qualité du long-métrage en question, même s’il peut y avoir des exceptions. Ce qui n’est hélas pas le cas pour « Anaconda », en salles depuis ce mercredi, digression « comique » sur le film original « Anaconda le prédateur » datant de 1997, que nous sommes donc allés voir lors d’une des nombreuses avant-premières publiques du film organisées la veille de sa sortie, mardi soir. Le récit suit une bande de Pieds nickelés qui, lorsqu’ils étaient au lycée, bricolait des courts-métrages d’horreur en Super 8, se rêvant en futures stars du film fantastique. Un rêve qui a tourné court : Doug ( l’acteur et rocker Jack Black ) est désormais réalisateur de vidéos de mariage et emploie en tant que cadreur Kenny (Steve Zahn), alcoolique notoire. Tandis que Griff (Paul Rudd), qui se prend pour un grand acteur car il a joué une saison dans une série à succès, ne s’illustre que dans des films institutionnels et que Claire, la jolie starlette de la bande, est devenue avocate. Mais voilà qu’ils se mettent en tête de produire un « reboot » (nouvelle version) d’« Anaconda le prédateur » : une fois arrivés en Amazonie, les ennuis vont tomber en cascade tropicale, tandis qu’un serpent géant et des chercheurs d’or vont en vouloir à leur peau. Heureusement, ils sont surtout là pour rigoler... Nous aussi, mais ça n’arrivera qu’à peu de reprises au cours de cette farce difficile à classer. Un film idiot réalisé par des gens idiots Comédie de genre, série B, série Z, parodie ou pastiche ? On ne sait pas bien, le réalisateur et son scénariste non plus d’ailleurs. L’affaire se solde par une avalanche de situations comiques pas vraiment légères, voire carrément lourdes ou grossières, comme cette séquence terriblement étirée où l’un des protagonistes doit uriner sur Jack Black qui s’est fait piquer par une araignée venimeuse - merci pour tant de finesse et de poésie. Mais le problème majeur du long-métrage réside dans son concept même de « film dans le film ». Ce projet fait figure, sans mauvais jeu de mots, de serpent qui se mord la queue car son récit conte comment une poignée de gens idiots vont parvenir à réaliser un film idiot : or à l’arrivée, « Anaconda » est vraiment un film idiot réalisé par des gens idiots. Pour le reste, on a droit à un festival d’effets spéciaux (volontairement) atroces et, tout de même, à quelques gags décalés bien sentis lorsque cette troupe de zozos se persuade qu’elle va rafler des Oscars avec son navet. Sans oublier le caméo halluciné de Ice Cube, comédien du « Anaconda » original, dans une courte séquence « hommage ». A part ça, tous les comédiens ont enclenché la manette du jeu outrancier en surrégime, même Thandiwe Newton qui s’est pourtant illustrée autrefois dans de grands films d’auteur. Bref, pas grand chose à signaler dans cette mauvaise blague qui devrait vite tomber dans les oubliettes du 7e art, un comble pour un film qui raconte la fabrication d’un film...