Venezuela : le président Maduro « quittera le pouvoir », promet la prix Nobel de la paix Machado

Venezuela : le président Maduro « quittera le pouvoir », promet la prix Nobel de la paix Machado

Caracas - La prix Nobel de la paix 2025 Maria Corina Machado s’est dite convaincue lors d’un entretien par visioconférence avec l’AFP lundi que le président vénézuélien Nicolas Maduro «quittera le pouvoir avec ou sans négociation», rappelant que des «garanties» lui avaient été proposées. La cheffe de l’opposition vénézuélienne, 58 ans, qui est entrée dans la clandestinité quelques jours après la présidentielle de 2024, estime que sa récompense et le déploiement américain sont un «coup fatal» pour le pouvoir. Washington a déployé en août huit navires de guerre au large des côtes du Venezuela. L’administration Trump a frappé en mer au moins quatre embarcations qu’elle a présentées comme étant celles de narcotrafiquants, pour un bilan d’au moins 21 morts. Plusieurs sources proches du pouvoir américain font état de frappes imminentes visant le territoire vénézuélien. «Avec ou sans négociation» «Maduro a en ce moment la possibilité d’avancer vers une transition pacifique. (...) Avec ou sans négociation, il quittera le pouvoir», a-t-elle lancé. «Nous avons dit être prêts à offrir des garanties, que nous ne rendrons pas publiques tant que nous ne serons pas assis à cette table de négociation. S’il insiste, les conséquences seront directement de sa responsabilité. De personne d’autre», prévient-elle. «Ils (le pouvoir) sont conscients que nous sommes dans une phase finale et décisive (...) Ces dernières heures, plusieurs camarades ont été arrêtés, la répression augmente. C’est une façon d’essayer de paraître forts parce qu’ils savent que tout ce qui se passe (déploiement et prix Nobel) est un coup fatal», assure Mme Machado. «Le monde entier sait qu’ils ont été battus à plate couture. Nous avons démontré notre triomphe», ajoute-elle à propos de la présidentielle de 2024. L’opposition qui a collecté les procès-verbaux des bureaux de vote assure avoir prouvé la fraude du pouvoir. Le conseil national électoral, considéré aux ordres de Maduro, l’a déclaré vainqueur, sans publier de chiffres détaillés, affirmant avoir été victime d’une attaque informatique. Intervention américaine «Je ne vais pas spéculer», a-t-elle réagi sur le déploiement américain. «Celui qui a déclaré la guerre aux Vénézuéliens, c’est Nicolas Maduro». «Je l’ai répété d’innombrables fois: sans liberté, il n’y a pas de paix et sans force, il n’y a pas de liberté quand tu fais face à une structure narco-terroriste. Nous avons tout essayé», a-t-elle néanmoins souligné. «L’invasion qui existe ici est celle des Cubains, des Russes, des Iraniens (alliés traditionnels de Caracas), du Hezbollah, du Hamas, des cartels de la drogue, de la guérilla des Farc», accuse-t-elle. «Nous, les Vénézuéliens, nous n’avons pas d’armes à feu, nous avons la parole, nous avons l’organisation citoyenne, nous avons la pression, nous avons la dénonciation», dit-elle. Relations avec Trump et les Etats-Unis Mme Machado qui a dédié son prix au «peuple vénézuélien qui souffre» mais aussi au président américain souligne que c’est «reconnaître au président Trump ce que nous considérons juste et nécessaire (...) C’est pour lui transmettre à quel point le Venezuela a besoin de son leadership et de la coalition internationale qui s’est formée». «Nous avons un grand respect et une communication fluide (avec Washington), comme j’en ai avec de nombreux autres gouvernements», confie Mme Machado. Elle a refusé d'évoquer la périodicité des contacts ou la lutte d’influence que se livrent, selon les médias, le secrétaire d’Etat Marco Rubio et l’envoyé spécial Richard Grenell. «Corruption et répression» «L’argent, lorsqu’il leur parvient (au pouvoir) passe d’abord dans la corruption. C’est le plus grand pillage de l’histoire de l’humanité. En deuxième lieu, (l’argent) va à la répression. (...) Mais il n’y pas d’argent pour les médicaments, les enseignants, les services publics, les personnes âgées», assure Mme Machado. Armée «Il faut offrir des garanties, et ceux qui facilitent une transition en auront (...) Ce message, nous l’avons adressé à toute la structure des Forces armées, aux corps policiers et aux employés publics», dit-elle. Imagine-t-elle un soulèvement ? «Nous avons tous - civils, militaires - un rôle à jouer et, dans tous les cas, toute action qui respecte (la victoire revendiquée par l’opposition à la présidentielle) le 28 juillet serait le rétablissement de la Constitution». Son avenir «Notre président élu (Edmundo Gonzalez Urrutia, selon l’opposition) a déclaré qu’il souhaite que je l’accompagne en tant que vice-présidente», a déclare Mme Machado, qui n’avait pu se présenter car déclarée inéligible. «Je serai là où je pourrais être le plus utile à notre pays». A propos de sa clandestinité, elle affirme ne «pas compter les jours, mais soustraire ceux qui restent, parce que je ne doute pas une seule seconde que nous sommes dans un compte à rebours». Patrick FORT et Javier TOVAR © Agence France-Presse

Sébastien Lecornu face à l'Assemblée, son gouvernement suspendu à la réforme des retraites

Sébastien Lecornu face à l'Assemblée, son gouvernement suspendu à la réforme des retraites

Paris - C’est l’heure de vérité pour Sébastien Lecornu, après des semaines de crise politique: le Premier ministre va enfin prononcer mardi sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée, où ses engagements sur les retraites dicteront la conduite des socialistes, qui détiennent la clé de la censure. Le pensionnaire de Matignon se rendra d’abord à l’Elysée pour un premier Conseil des ministres à 10H00. Sa nouvelle équipe examinera les projets de budget de l’Etat et de la Sécurité sociale, afin qu’ils soient transmis dans les temps au Parlement. Mais c’est à partir de 15H00 que les choses se joueront, à la tribune de l’Assemblée nationale, avec sa déclaration de politique générale. Les responsables des groupes parlementaires pourront ensuite lui répondre avant qu’il ne reprenne une dernière fois la parole. Si l’exercice impose qu’il aborde de nombreux sujets cruciaux pour le pays, l’attention sera focalisée sur les retraites. «Nous demandons clairement la suspension immédiate et complète de la réforme» de 2023, adoptée sans vote au prix d’un recours au 49.3, a martelé lundi le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure. La question est délicate pour Sébastien Lecornu, dont la priorité est de «donner un budget à la France d’ici la fin de l’année». Même le camp présidentiel est divisé sur la question: si certains ne veulent pas voir détricoter un marqueur emblématique du second quinquennat d’Emmanuel Macron, d’autres espèrent une suspension pour tenter de sortir de la crise politique. «Il faut bouger clairement sur les retraites et j’espère que le Premier ministre le fera demain», a ainsi estimé lundi le député macroniste Charles Sitzenstuhl. Selon des sources gouvernementales et parlementaires, Sébastien Lecornu invitera mardi à Matignon les ministres et députés du camp gouvernemental, avant de se rendre à l’Assemblée prononcer son discours. «Pente naturelle» Le PS tiendra un Bureau national à 13H00, a-t-on appris auprès d’une source socialiste. Et se retrouve sous la pression des autres oppositions, RN et LFI en tête. «C’est le moment de vérité», a lancé lundi le patron du RN Jordan Bardella. Le gouvernement «va évidemment tomber puisqu’il n’y a aucune possibilité de suspension des retraites avec les gens qui sont là-dedans», a jugé pour sa part le chef de file de LFI Jean-Luc Mélenchon. A ce stade, deux motions de censure ont été déposées, par LFI et des alliés de gauche, et par la coalition RN/UDR, le parti d’Eric Ciotti. Le PS pourrait décider de déposer sa propre motion mardi après le discours de politique générale. Le choix des socialistes sera décisif: leurs voix feraient presque assurément pencher la balance de la censure, qui nécessite 289 voix. Si tout le reste de la gauche (insoumis, écologistes et communistes) et l’alliance RN-UDR votaient une censure, il ne faudrait même qu’une vingtaine de voix du PS pour faire tomber le gouvernement. Une équation qui interroge un conseiller de l’exécutif: «est-ce que Faure tient le groupe?» «On a peut-être une douzaine, une dizaine de députés, qui voteront quand même» la censure, même si le groupe appelait à s’abstenir, a commenté sur LCP le porte-parole des députés socialistes Romain Eskenazi. Il estime toutefois que si le gouvernement accède à des demandes sur les «retraites, le pouvoir d’achat et la fiscalité», il sera épargné. «Je pense que la pente naturelle des députés est de dire +franchement, on sanctionne tout ça+", résume une source au sein du groupe. Selon lui, «en leur for intérieur», les députés socialistes sont partagés alors que «les Français sont aussi fatigués» par la crise politique et «qu’ils nous demandent de nous entendre». D’autant que le PS escompte décrocher d’autres victoires dans l’hémicycle. L’objectif du projet de budget est de garder le déficit en dessous des 5% du PIB, au lieu de 4,7% initialement prévu, un assouplissement qui laisse une marge de 9 milliards d’euros pour éventuellement satisfaire les demandes des oppositions. «Sur ces bases là, nous allons pouvoir réviser complètement la copie qui va être présentée en Conseil des ministres», a estimé lundi Olivier Faure. Sami ACEF © Agence France-Presse